En collaboration avec Nova Jazz
Il y a des groupes qui arrêtent le temps et s’inscrivent à tout jamais dans la mémoire du public. Quiconque a déjà vu celui-ci en live confirmera que sa performance est autant minimaliste et précise que colérique et spectaculaire.
Leurs concerts sont des décharges d’énergie dans le champ de la composition moderne et de l’improvisation libre. Derrière les portes ouvertes par Schnellertollermeier se cachent de nouveaux paysages inexplorés de musique minimale, d’avant-garde et d’influences électroniques, avec des emprunts au krautrock et au punk. Ce n’est pas un concept qui est mis en musique. C’est de la musique pure qui coule, qui a sa propre volonté.
L’équilibre traditionnel des forces entre la batterie, la basse et la guitare est donc aboli par Schnellertollermeier. Ainsi, la guitare reprend le rôle de la batterie en tant que centre mélodique et tranchant de la section rythmique à certains endroits, tandis que la batterie elle-même suit apparemment son propre plan. La basse se fond inséparablement avec les fréquences de ses voisines, ou devient l’actrice principale de la polyphonie, de sorte qu’on ne peut plus dire où finit tel instrument et où commence tel autre. Il n’y a pas de solos, mais des arcs de cercle étroitement imbriqués. Dans ses moments les plus enivrants, le groupe sonne comme une grande boîte à rythmes, construite à partir d’éléments humains qui font ce que les ordinateurs ne peuvent pas faire : prendre des risques, développer leur propre logique, suggérer des tournants inattendus.
Manuel Troller : guitare
Andi Schnellmann : basse
David Meier : batterie
© Crédit photo Simon Habegger
Depuis que le jazz a pris son virage bop et free, chaque génération résout à sa manière cette éternelle équation : comment réconcilier musique savante et plaisir simple ? À chaque fois, l’opinion s’est divisée entre orthodoxie et hédonisme.
Formés à la rigueur théorique du classique et du jazz, experts de leur instrument et nourris de culture hip-hop, des scènes club techno et house, Matthieu Llodra et Arthur Donnot – compositeurs de KUMA – se jouent des codes parce qu’ils les maîtrisent.
Constitué en 2015, Kuma explore un groove urbain qui évoque avec un son contemporain le souljazz des 70’s : quand le talent instrumental rencontre la simplicité pop. Honey & Groat, leur dernier album, est à l’image de l’ours (kuma en japonais) : doux et faussement placide, la puissance en réserve.
A l’écoute de Honey & Groat, la douceur et l’élégance s’imposent d’emblée. Les thèmes vont et viennent, non pas comme des rendez-vous, ces quittances collectives que le jazz classique impose à l’égo des solistes, mais comme le « hook » des titres d’electro instrumentale. Un ancrage pour l’auditeur, un refrain, entre ostinato et ritournelle, un motif décliné au besoin.
Arthur Donnot : saxophone, effets
Matthieu Llodra : fender rhodes
Fabian Iannone : basse électrique
Maxence Sibille : batterie
© Crédit photo Romain Farine